Certaines entreprises du BTP n’ont pas conscience des risques (pénal et financier) qu’elles prennent lorsqu’elles sous-traitent sans précaution élémentaire en marché privé. Voici 3 choses à faire pour éviter ces risques en cas de sous-traitance.
1ère chose à faire : faire connaître son sous-traitant au client (maître d’ouvrage)
Vous devez solliciter le maître d’ouvrage afin qu’il accepte votre sous-traitant et agrée ses conditions de paiement. Il s’agit d’une obligation imposée par l’article 3 de loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance.
Et si je ne le fais pas ?
Vous vous exposez à plusieurs risques :
– risque pénal : le dirigeant ou l’entreprise s’expose à une amende pénale
– le sous-traitant peut agir directement contre le chef d’entreprise (sur son propre patrimoine) en cas de préjudice causé par l’absence d’acceptation et d’agrément
Ce préjudice peut être l’impossibilité pour le sous-traitant d’être payé par le maître d’ouvrage en cas de défaillance de l’entrepreneur principal. En effet, le sous-traitant accepté et dont les conditions de paiement ont été agréés bénéficie d’une « action directe » contre le maître d’ouvrage (le client final) pour être réglé par ce dernier. Mais si le sous-traitant n’a pas fait l’objet de cette formalité, il ne peut agir contre le maître d’ouvrage par la faute de son donneur d’ordre.
Autre conséquence, vous serez dans l’impossibilité d’opposer le contrat au sous-traitant. Par exemple, vous ne pourrez pas vous prévaloir des pénalités de retard.
Le sous-traitant peut quant à lui arrêter ses travaux en mettant fin au contrat pour ce motif, et ce y compris en cours de chantier.
2ème chose à faire : fournir une garantie de paiement au sous-traitant
Vous devez fournir à votre sous-traitant une garantie de paiement.[1]
Cette garantie prend la forme d’une caution bancaire (comme pour la garantie de paiement de l’entrepreneur principal). Mais vous pouvez échapper au cautionnement en proposant une délégation de paiement. Dans ce dernier cas, vous demandez au maître d’ouvrage, qui doit l’accepter, de payer directement le sous-traitant.
La caution est rarement pratiquée (en raison de son coût). Il en va de même de la délégation de paiement (le paiement direct par le maître d’ouvrage).
Toutefois, en l’absence de caution ou de délégation, vous vous exposez à la nullité du contrat [2] : c’est comme si aucun contrat n’avait jamais été conclu.
Quelles sont les conséquences ?
Si le sous-traitant invoque cette nullité, les risques sont multiples :
– vous pouvez vous retrouver à devoir payer au sous-traitant un prix supérieur à celui convenu (la valeur réelle de ses prestations, et non le prix contractuellement dû) [3]
– le sous-traitant peut interrompre le chantier [4]
– impossibilité d’invoquer à votre profit les stipulations du contrat, notamment les pénalités de retard
Cette nullité peut être invoquée par le sous-traitant jusqu’à 5 ans après la conclusion du contrat.[5]
3ème chose à faire : vérifier le respect par le sous-traitant de ses obligations en matière sociale (principalement au titre de la lutte contre le travail dissimulé)
Cette obligation de vérification (devoir de vigilance) s’applique pour les contrats d’un montant supérieur ou égal à 5 000 €.
Vous avez l’obligation de vérifier que le sous-traitant respecte ses obligations en matière sociale, notamment dans le cadre de la lutte contre le travail dissimulé.
En pratique, vous devez solliciter divers documents du sous-traitant dont, entre autres[6] :
– extrait K bis ou carte professionnelle attestant de son inscription au répertoire des métiers
– attestation de vigilance URSSAF
Pourquoi le faire ?
Le risque est essentiellement financier.
A défaut de solliciter et d’obtenir les documents en question, vous risquez d’avoir à payer les impôts, taxes et cotisations obligatoires dus par le sous-traitant au Trésor public ou aux organismes de protection sociale (ainsi que des pénalités et majorations éventuelles) [7].
En résumé, pour éviter les risques pénaux et des conséquences financières pouvant être importantes, vous avez 3 choses à faire en cas de sous-traitance : présentez votre sous-traitant et ses conditions de paiement à l’acceptation du maître d’ouvrage, fournissez-lui une garantie de paiement et vérifiez qu’il est bien en règle au regard de ses obligations en matière sociale.
[1] article 14 de loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance
[2] article 14 de loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance
[3] Cour de cassation, 3ème chambre civile, 13 sept. 2006, n° 05-11.533
[4] [4]Cour de cassation, 3ème chambre civile, 18 nov. 2009, n° 08-19.355
[5] Cour de Cassation, 3ème chambre civile, 20 février 2002, 00-17.406
[6] Article D8222-5 du code du travail
[7] Articles L8222-1 et suivants du code du travail